Sujet clos


Il est déjà beaucoup trop tard pour que je me mette à l’écriture, je dois cependant absolument me décharger de ce trop-plein de rancœur qui m’anime.

Au-delà du temps et de l’énergie perdus à les offrir à des personnes ou situations qui n’en valent pas la peine, c’est la blessure dans l’amour-propre d’être dupée qui reste pour moi la plus douloureuse. Je lisais un article il y a à peine deux jours sur l’illusion, et la culpabilité qui l’accompagne quand on se prend en plein visage l’évidence que l’on a repoussé jusque-là, par facilité, peut-être, par vanité, sûrement. Et même après autant de chemin parcouru, même après avoir appris à dompter ses émotions, l’écho de ses carences anciennes reviennent à la charge et vous trompe sur vous-mêmes.


J’essaye tant bien que mal de ne pas me laisser guider par les pulsions, ravageuses, qui me font sans cesse nourrir mon cœur de regrets. Alors je m’assure d’avoir envie d’exactement ce qui se passe à l’instant T et de ne pas me laisser embarquer dans les projections d’autrui, si tant est qu’elles ne soient pas tournées vers mon bien-être. J’essaye aussi de ne pas prendre de « décision » que je trouve trop restrictive et qui me font douter de leur bien-fondé. J’essaye enfin de vivre en « douceur » pour ménager cet esprit en reconstruction pour qu’il n’ait plus besoin de béquille et sache voguer vers le mieux-être sans garde-fou.

Finalement, quelques semaines perdues à croire que j’étais maîtresse de ma situation, alors que je refusais de voir que je me dirigeais encore sur une pente glissante, fermement entrainée par un personnage à l’âme trouble, m’ont aidé en un point majeur vers mon chemin tout neuf : les démons sont endormis, voir même bientôt morts. Seule la colère infantile déclenchée par un sentiment d’injustice et de danger reste sur le vif.


Bien entendu, la part de responsabilité à repousser une échéance m’est toute entière, mais aujourd’hui j’arrive à mener un exercice très singulier qui m’a beaucoup aidé. Je ferme les yeux, ou pas d’ailleurs, et je me visualise petite, toute petite ; j’ai peur, et je ne comprends pas pourquoi tant de déchirements m’entourent, s’ils m’incombent ou non, je suis terrifiée par si peu de protection, par une telle exposition au mal-être de ceux que j’aime, et je me souviens que c’est là, à ce moment que s’est gravée l’idée, la doctrine même qu’on ne m’aime pas, et que tout est de ma faute. Alors je parle à cet enfant, impuissante et coupable de grandir au mauvais endroit, que rien n’est de sa faute, que les malheurs des gens que l’on aime n’est pas de se responsabilité, je lui répète que tout va bien, que la vie est belle et qu’elle va vivre de belles choses. Je lui répète encore et encore … Et la douleur s’amenuise, les torsions dans la poitrine s’envolent et les vrais responsables du passé comme du présent s’effacent, ils deviennent des êtres vivants au loin de mon existence qui n’ont plus aucune influence sur mon autocritique.


Le jour où j’ai réussi à avoir conscience de l’existence de cette petite fille, et il en fallu du temps et des séances de thérapie pour la voir et réussir à lui parler, j’ai repris goût à la vie au présent.


Je ne veux pas que l’on me sauve de moi-même, je veux retirer toute la fierté du résultat à venir, et surtout pas en pensant que je suis un problème personnifié. Je fuirai aussi loin que possible n’importa quelle personne qui essaierait de me le faire ressentir à nouveau. Et je ne me laisserai plus avoir par la peur de ne pas être aimée, car force est de constater que c’est le meilleur moyen d’être très mal accompagnée.


Les gens qui vous aiment vous secouent dans tous les sens quand vous êtes sur la mauvaise voie, mais sont toujours là pour écouter vos frasques, avec le sourire, parce « qu’il vaut mieux en rire qu’en pleurer ». Ce sont les mêmes qui s’assurent que vous allez dans le bon sens quand ils vous sentent apaisés. Sans jamais s’imposer, témoignant d’une affection sincère, en partageant leurs propres péripéties comme pour acquiescer que ce n’est complètement simple pour personne. Une heure, dix minutes, plusieurs jours en leur présence sont un délice pour toute la bienveillance qu’ils ont à offrir.


Ouvrez les yeux, ils sont partout quand on laisse partir sa petite fille intérieure.




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