L'aventure du marin


C'est bien la première fois qu'ici un sentiment de peur m'envahit.
Peur de ce que je pourrais écrire, de ce qui sera lu, et interprété. Pourtant il s'agit bien de se jeter à l'eau tant les confidents de haut vol me le préconisent.
L'écriture serait ma clef la plus puissante vers davantage de liberté après avoir déballé ici et là mes états d'âme et autres tortures mentales. Je n'ai pas la moindre idée à cet instant de la meilleure façon d'ouvrir les vannes sans avoir l'impression désagréable de livrer trop d'intimité. Mais il est certain que l'exercice de dompter le sens de la formule s'emparant de mon esprit, s'accapare mes idées chargées d'émotions, pour les poser ligne après ligne et peut-être les laisser, un peu, derrière moi.
La vie est réellement pleine de surprises .... Quand elles sont belles et joyeuses, c'est pour nous rappeler que chaque jour vaut la peine d'être vécu, ressenti, vu, entendu, même déstabilisant, même chargé d'inconnu, et prendre le risque d'avancer prend alors tout son sens. 
Malheureusement, il existe aussi les mauvaises surprises, les épisodes dont chacun se passeraient bien. Il y a des épreuves qui peuvent être nécessaires pour franchir une étape, passer un cap ; et d'autres qui ne vous apportent pas plus que du désarroi, et qui resteront inscrites comme injustes et inutiles. Le genre d'épisode qui viendra tester votre capacité à résister, à surmonter, éprouver votre entourage, la solidité de vos relations. Pour ma part, même si j'ai appris avec le temps à signaler à mes âmes de confiance les détresses de ma vie pour ne pas les traverser seules et puiser dans leur force naturelle un peu d'énergie positive, quand l'obstacle semble plus brutale que tout ce que j'ai affronté auparavant, je peux avoir un réflexe d'extermination de toute forme de vie autour de moi. Mon cerveau devenu incapable de comprendre toutes les informations qui circulent autour de lui, le corps peu à peu courbatu d'un combat qu'il n'a factuellement pas mené mais qui se fait l'écho de la douleur mentale, ou quand l'autisme de survie se met en place sans que je puisse rien n'y faire. Et pourtant je sais parfaitement que d'autres se reconnaîtrons sur cette mauvaise manie de se couper du monde quand une difficulté est trop grande, trop pénible, pour feindre une parfaite gestion de son existence. A ce moment précis, perdu, aveugle, presque sourd, même conscient que le quotidien reprendra le court de son chemin sous peu, parce que la vie est ainsi faite, parce que l'instinct de survie est plus fort que tout, c'est là que les personnes qui vous aiment sincèrement vous montrent du bout du doigt les jolis dessins qui nous entourent et que l'on a du mal à entrevoir ...
Et alors ? Il faut bien laisser toutes les émotions s'exprimer, les sentir se mélanger, se succéder, pour les laisser lentement se fatiguer, se calmer, s'assagir, et voir les heures reprendre leur droits sur le jour qui se lève ... Les impératifs, les envies, les devoirs, les lubies, les joies, les petites contrariétés, les jours de la semaine, les longues heures de la nuit, aujourd'hui, demain ; tout doit reprendre sa place après ce chao qui tente de tout détruire.
C'est la première fois que j'ai peur d'écrire, le ventre noué, la poitrine serrée, que va-t-il ressortir de ces lignes ? Ici j'ai l'habitude d'expier, de partir à la conquête de ma liberté et d'une sérénité tant convoitée. Aujourd'hui je dis, sans dire, je parle sans être claire, j'exprime sans expliquer, et tout devient réel. 
Garder pour soi une information personnelle, protéger son intimité c'est à la fois un moyen comme un autre de ne pas avoir à entendre les avis et opinions, qui seront pour ceux qui les prodiguent des conseils bienveillants, quand ils sont pour celui qui les entend d'insoutenables petits coups d'aiguilles qui réveillent sans cesse les sensations que l'on tente d'endormir. 
Pourtant ne serait-ce pas une étape nécessaire ? L'excès de discrétion n'aboutit-il pas à un renfermement, un ralentissement. Comment franchir le pas seule avec ses pensées qui tournent en rond ? Qui peut prétendre avoir la sagesse de trouver les réponses, les issues, uniquement seul ... Je fais partie de ceux qui, si on les laisse faire, font le vide quand tout va mal. Pour qui, pourquoi ? j'y travaille, sauf quand l'épreuve est nouvelle, et que rien ne nous prépare à cette nouveauté. On se croit d'ailleurs souvent à l'abri de certains tracas, mais la vie est bien plus inventive que tout ce que l'on est capable d'imaginer.
Je n'avais d'ailleurs pas bien vu jusqu'ici, à quel point je pouvais compter sur les ressources insoupçonnables de celui qui a changé le cour de ma vie, pour raviver une certaine joie de vivre, qui était prête à se faire la malle pour un long moment, rattraper au vif avec une ténacité surprenante par des intentions, des actes, des mots qui vont  dans le sens du bonheur, et neutraliser les méfaits des perfides imprévus d'une vie qui ne sera jamais sur des rails.
Les nouveaux questionnements que suscitent une épreuve, m'ont obligé à réaliser, que l'on est pas toujours seul dans l'interrogation. Ainsi, apprendre à nouveau à être deux, dans un modèle plus qu'atypique, emprunt de grands moments de bonheur, c'est finalement dans la difficulté que le Deux prend toute son essence, sa force et son sens. 
Le temps fera comme d'habitude son oeuvre, en attendant, je flotte au-dessus des jours qui passent et je laisse les "choses" reprendre leur place pour retrouver la mienne ... Même si j'ai un doute qu'elle soit restée tout à fait la même. Et justement ne serait-ce pas l'occasion d'en inventer une nouvelle ? 
On verra plus tard ...


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