Le droit de l'écrire

 Le chagrin d’amour est une introspection, et comme toute introspection, c’est une épreuve.

Les chanteurs, chanteuses, les peintres, les poètes, les artistes en générale exhibent leur souffrance comme exutoire. Alors que nous, communs des mortels, nous cachons quand tout s’effondre, honteux de notre chagrin. Pourquoi ?

Pourquoi devrais-je dissimuler la violence des émotions et sensations qui me transpercent, me paralysent, m’asphyxient ? Alors qu’écrire participe à ma rédemption. Depuis toujours. J’en ai besoin, je me le dois. Assumer, dire, hurler ma peine.

Ceux qui à l’inverse se targuent de se relever rapidement et sans dommage sont surement, au mieux trop bêtes, au pire trop impatients de digérer chacune des étapes de ce deuil. Parce que s’en est un. Bien moins grave et dramatique, bien heureusement, que la réelle disparition d’un être aimé, la rupture est une petite mort en soi.

Je ne retracerai pas les différentes étapes de ce type de deuil, bien loin de moi la prétention d’être capable de verser dans la psychologie bas de gamme peu documentée. Mais je sais ce que je vis, ce que je ressens.

Et j’ai envie d’écrire un adieu. Un adieu à mon âme d’enfant, à mon insouciance, à ma spontanéité et à mon amour de l’Amour. Parce qu’aujourd’hui, je crois, peut-être à tort, que j’ai vu s’envoler les dernières bribes de légèreté amoureuse qu’il me restait à dévoiler.

Je n’ai pas eu l’impression de devoir fournir un effort particulier pour aimer, mais lutter contre l’évidence de l’échec m’a tant coûté. J’ai l'impression d’y avoir laisser mon âme.

Une amie me rappelait ce que j’ai fait marquer à vie sur mon corps : « Always make new mistake », pour ne pas oublier que j’ai toujours choisi de vivre les choses quelles qu’en soit les conséquences, à tort ou à raison. Au moment où j’aurais tant aimé ne pas « faire une nouvelle erreur », ce triste mantra inscrit pour toujours est venu justifier son indélébilité. Une existence entière à devoir se relever de ses propres erreurs. Comme pour me protéger de cette crédulité qui me punit, j’ai choisi d’afficher ma capacité à me tromper, à plonger trop vite dans des eaux qui me seront tôt ou tard toxiques.

Pourtant.

J’ai vraiment cru être sur la bonne voie, et j’ai décidé de garder éternellement la date de ce renouveau au creux de mon bras.  J’ai espéré avoir raison de continuer ce chemin, j'ai essayé de mettre de côté les évidences. Tant donner. Tant aimer. Pour encore une fois tomber.

Qui suis-je pour prétendre mériter tout ce que je pouvais attendre d’une histoire d’amour ? Qui suis-je pour croire aux doux chants de la romance ? Sérieusement, pourquoi ai-je voulu quitter le difficile sol de la réalité ? Pour retomber encore de plus haut ? Alors disons que j’ai gagné à tous les niveaux de ma chute.

Pourquoi cacher ce terrible chagrin, qui vous terrasse, vous plaque au sol, attendant qu’un fragile espoir de reprendre son souffle vienne vous frôler du bout du doigt ? Peu importe … Un jour, il faudra se relever ; en attendant je compte les minutes … Et j’écris.

Beaucoup trop vite, pas assez loin, et bien moins longtemps que promis.



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