Midi à quatorze heures

Vous croyez au Karma vous ? 
Pas moi.
Je crois au hasard, je crois aux convictions, je crois aux attractions, je crois à l'enchaînement d'évènements successifs nous conduisant d'un point à un autre en laissant derrière lui une sensation d'impuissance, tout en induisant une certaine forme de choix à faire à la va-vite, ou non. Je me suis souvent répétée que nous n'avions de limites que celles que nous nous imposions nous-mêmes ; prétentieux ? Pas vraiment, c'est juste une façon de ne pas rejeter la faute sur les éléments qui nous entourent. Bien évidemment il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir, mais il faut essayer, tout essayer pour vivre ce que l'on a envie de vivre quitte à y laisser du temps, de l'énergie, une partie de soi-même. Il n'y a qu'ainsi selon moi qu'on peut toucher du bout du doigt le fruit de nos rêves, souhaits, aspirations et qui sait à force d'entêtement pour finir par l'attraper à pleine main et en jouir autant qu'il nous est permis de le faire. Encore faut-il connaître ses envies réelles et profondes. Cela demande de se plonger dans une multitudes d'expériences pour savoir où se situe le curseur de son propre seuil de tolérance, ou laisser la passionaria qui sommeille se révéler et s'éprendre d'un univers, un lieu, une personne.
Il est un combat féroce de ne pas se laisser enfermer dans une vie sans relief, sans réel but autre que conformiste et matérialiste, où l'on devient vite esclave des décisions de tout autre que soi-même. La générosité consiste entre autre à offrir, à s'offrir sans attendre de retour, pour combler ceux que l'on aime, ou juste pour respecter la bienséance profondément inculquer au prémices d'une vie inexpérimentée. Mais n'est-elle pas insipide et bien moins sincère quand elle découle d'un principe éducatif et non d'une envie de partager son propre bien-être, sa confiance en demain, le courage offert par d'autres, je parle ici d'un cadeau sincère et profond et non d'une coutume appliquée par automatisme dont finalement ne se sera retirée que la satisfaction d'avoir fait ce qu'il fallait. 
Aussi le karma n'a rien à voir là-dedans, on dit bien à qui veut l'entendre que l'on récolte ce que l'on sème ... Mais où trouver le courage de semer ? De décider ? D'agir ? Je reste convaincue que l'envie reste le leitmotiv de toute forme de témérité, qui si elle est assaisonnée d'un peu de lucidité, reste dans une optique de risques moindres voir constructifs. Des risques constructifs ? Évidemment ! C'est toujours celui, celle, qui s'avance en tête de file vers un horizon inconnu qui récolte les lauriers de son envie de savoir ce qu'il y'a "après". 
J'ai l'impression que dans toutes expériences l'on sait assez vite s'il faut rebrousser chemin pour en emprunter un différent, ou s'il faut s'obstiner malgré les embûches, difficultés et blessures accumulées en cours de route. Il arrive que la simplicité, l'évidence s'imposent quasi-immédiatement à un nouvel épisode de sa vie, une arrivée dans un nouvel emploi où l'on sait qu'on va s'épanouir, comme à l'inverse d'où l'on a envie de fuir dès les premières heures de son agenda ; en amitié, je me rappelle  de ces rencontres qui ont fait naître immédiatement chez moi cette sensation de plénitude à l'écoute des quelques échanges syllabiques ; ainsi en amour cette sensation fut assez rare, au-delà de la passion conditionnée par les hormones, le physique, et les réflexes auto-destructeurs de chacun, je parle de ces rencontres où vous êtes envahi tant au niveau de l'esprit, puis peut-être à peine quelques heures plus tard au niveau du coeur, par l'idée absurde et entêtante que la personne en face, à côté, tout près de vous ne sera pas une simple parenthèse dans votre histoire. 
A l'inverse, l'on peut se jeter corps et âme dans des projets, relations tant amicales qu'amoureuses, et  devoir regarder dame Réalité dans les yeux pour accepter de renoncer. Tout investissement demande un réalisme nécessaire à sa viabilité. Je ne suis pas partisane du "rien n'est impossible". Mais à la différence du projet matériel, sportif, culturel, professionnel, la préparation, les recherches, la détermination, la diplomatie, et encore bien d'autres stratèges peuvent réussir à nous conduire à l'aboutissement, à la concrétisation de ces derniers, pour ce qui est du rapport humain, il n'est question que d'humain,
Là encore le karma n'a pas son mot à dire et c'est bien toute la complexité de la quadrature du cercle. Tout n'est plus qu'une questions d'affinités, arrosées de temps partagés, saupoudrées de confiance et de confidence, pimentées de plaisirs secrets, fouetté à grands coups d'éclats de rires, et conserver à l'abri des non-dits et des trahisons. Tout cela sans avoir l'assurance de ne pas être déçu par le tout, un mauvais dosage, l'utilisation d'un ingrédient allergène, ou bien encore parce que le goût obtenu n'est pas celui qu'on espérait quand on s'est vu se lancer dans la découverte de ce lien. Pourtant je reste convaincue, que planté devant la vitrine du boulanger, quand le nez et les yeux se mettent d'accords, l'énonciation des ingrédients vous décourage rarement de vous ruer sur une pâtisserie alléchante, le qualité du goût restant toujours la part d'inconnue.
Enfin voilà, côté projets, une année après l'autre, mener sa barque seule n'est pas tache aisée, et il me reste toute une vie pour avoir et concrétiser une multitudes d'envies, les responsabilités de wondermum m'astreignant à un calcul ultra précis du risque à prendre. Côté humains ... Les plus belles âmes sont là, d'autres me manquent, il me faudrait deux ou trois vies pour profiter des gens autant que je le voudrais, tout en chérissant mes "amitiés-trésors". Pour le reste, ma dernière expérience gastronomique a déclenché une multitudes d'incidents, blessures et mauvais dosages, durant l'exécution de la recette, dont le livre de cuisine n'avait pas du être, semble-t-il, ouvert à la bonne page, et qui s'est soldée par l'abandon de la réalisation. Paraîtrait-il qu'il ne faut pas rester sur un échec, mais le livre de recettes qui renferme ce secret culinaire unique, jeté brusquement au sol,  s'est refermé sans que je n'aie eu le temps de marquer la page. Et personne pour m'indiquer le bon index, m'exposer l'intérêt d'essayer à nouveau, ou simplement me guider au bon déroulement.
Pourtant, il y a quelques mois, j'ai été prise d'une envie grandissante de me remettre à la cuisine, et ce n'est pas qu'une métaphore, l'envie de partager s'était invitée dans mes intentions en ravivant chez moi le plaisir de mener à bien une multitude de recettes qui n'ont aujourd'hui pour public que mes enfants, fervents admirateurs d'ailleurs, je tiens à le préciser !
Bref, j'ai acheté une table pour recevoir, partager et servir les gens qui comptent, et cet usurpateur de Karma ne m'a aidé ni à la trouver, ni à la ramener, ni à l'installer ! Poser les actes pour créer ses propres instants de plaisirs, et fournir l'effort nécessaire à sa réalisation.

Bon allez, il va falloir lancer les invitations maintenant ... Dès que j'ai à nouveau l'eau courante, promis !


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