Obscure confidente

Ce n'est pas difficile d'écrire. Nous avons tous quelque chose à dire, que cela soit intéressant pour autrui ou non. Non, ce qui me paraît le plus ardu, c'est d'oser. Oser aller chercher ce qu'il y a à l'intérieur. Ces portes qu'il faut ouvrir et derrière lesquelles on ne sait pas ce que l'on va trouver ... Le pire, comme peut-être le meilleur. Encore faut-il avoir l'énergie suffisante pour tourner la poignée, et accepter ce qui se cache derrière. 

J'aimerais parfois ne pas entendre les mots qui tambourinent derrière, qui veulent se libérer, et qui me terrifient. Pourtant, il faut commencer par les sas les plus désagréables pour laisser la place au meilleur de soi-même. Enfin, sans faire de généralité, c'est juste ce que je pense, ressens. Je suis une personne sincère, mais si peu avec moi-même. Ce n'est pas pour me frapper d'un costume de femme forte quand je prétends vouloir me consacrer à la conquête de cet être que je ne comprends pas, que je ne contrôle pas. C'est l'unique souhait d'être enfin prête à accueillir le bien-être et la sérénité pour de bon, qu'ils y trouvent leur place et qu'ils restent installés à long terme. Pourtant chaque fois que j'entame cette exploration, les différents obstacles me désarment, m'abattent et me clouent au sol. Et tout devient beaucoup trop compliqué à gérer, à vivre. 

Alors quoi ? Même faire semblant et m'aveugler ne fonctionne pas, tout les non-dits me rattrapent à grand coups de lattes derrière ces putain de portes que je ne peux plus retarder à ouvrir. Et tout ce bordel dans mon être, dans mon corps, bouffée par la honte de fonctionner comme une I.A. défectueuse, qui ne comprend pas tous les mots, qui donne de mauvaises indications, impossible à rebooter. Parfois une vielle bécane pleine défauts a plus de qualités qu'un modèle neuf, récent tout fraichement sortie d'usine. Mais l'utilisation est plus complexe, demande davantage de patience pour exploiter ces compétences devenues rares.

Incapable de régler mon pas sur mes pensées embrouillées, comment gagner sa propre confiance en soi, et comment accueillir l'univers ? Cet infini espace qui ne demande qu'à offrir ces secrets et ses merveilles. Il est pourtant vrai qu'une exploration se prépare, demande de l'entrainement, de l'investissement, beaucoup d'efforts sans jamais se décourager. Et je me suis faite une promesse, y aller, ne plus reculer, quoiqu'il en coûte. 

La peur et les regrets sont les pires poisons de l'esprit. Ils empêchent de regarder devant nous avec le sourire. Pourtant ils sont et restent les guerriers les plus vindicatifs à l'assaut de mes tentatives d'avancée. Et si je m'asseyais là, devant cet écran, pour les stopper à l'aide de mon clavier et leur demander ce qu'ils essayent de me dire ? Peut-être ne me veulent-ils aucun mal, peut-être veulent-ils seulement me prévenir ? Et si je ne les comprenais pas ? La peur de se tromper et d'avoir mal, ne voudrait-elle pas me dire de ne pas faire les choses, de ne pas vivre les instants, mais juste de prendre le temps de savoir ce qui est bon et ce qui ne l'est pas ? Les regrets ne souhaitent-ils pas juste me rappeler que les choses sont telles qu'elles sont, que l'histoire ne se réécrit pas, et qu'il faudra mieux saisir l'opportunité de meilleur quand elle se présentera ? 

Et si comme on m'a appris à le faire, je me faisais des montagnes de rien ? Et si je regardais là, les chances que j'ai vécues au milieu de ce tumulte, plutôt que de n'entendre résonner que ce que je n'ai plus ou jamais eu ? Les moments se délitent, les gens s'en vont, la vie déraille, certes. Mais je suis vivante, j'aime la vie et les gens qui restent. Pourquoi devenir sourde à ce qui est bon ? Parce que tout part en vrille ? Mais ce "tout" ne renferme qu'une partie du champ de vision. Ce tout qui m'empêche de dormir, m'anéantit les méninges, m'asphyxie la poitrine ... Pourquoi lui laisser toute la place ?

Ouvre donc ces portes ! Il ne va rien t'arriver à l'intérieur qui ne t'es déjà arrivé. Tu vas juste pouvoir calmer les démons qui s'y cachent, et pouvoir laisser entrer un peu de lumière ...

La nuit est belle, séduisante, impressionnante, la nuit est une dulcinée qui te fait danser ces torpeurs enivrantes. Mais elle n'est que plus belle quand le jour l'invite à laisser la place et prendre son rôle de créateur, de générateur d'énergie. 

Ecrire n'est pas difficile, le rendre utile à son existence reste indispensable.